« Le travail demandé aux administrateurs est exigeant » (Stéphane Lardy, France Compétences)

Trois mois après son installation, France Compétences a engagé des travaux décisifs pour le nouvel écosystème de la formation professionnelle. Stéphane Lardy, son directeur général, dresse un premier bilan de cette nouvelle instance de régulation.

Le Quotidien de la formation : Quel bilan dressez-vous des premiers travaux de France compétences ?

Stéphane Lardy : Un bilan positif. Après une phase de préfiguration très rapide, nous avons tenu un calendrier serré afin de donner de la visibilité aux acteurs dans la mise en œuvre de la réforme. Le conseil d’administration se réunit tous les mois et nous n’avons pas hésité à ajouter un conseil d’administration extraordinaire pour finaliser les recommandations faites aux branches sur les niveaux de prise en charge des contrats d’apprentissage.

La gouvernance quadripartite se met en place dans le respect de la parole de chacun. Elle se révèle constructive.

France compétences est une instance décisionnelle. Le travail demandé aux administrateurs est exigeant sur des sujets parfois complexes. Cela suppose un effort de pédagogie. Nous avons ainsi organisé des réunions techniques sur la méthodologie de la construction des niveaux de prise en charge ce qui a permis de la faire évoluer.

QDF : Que retenez-vous du travail d’évaluation des niveaux de prise en charge des contrats d’apprentissage ?

S. L : Rappelons que France compétences n’est pas là pour fixer les prix pratiqués par les CFA. Notre objectif est de faire converger les niveaux de prise en charge des contrats d’apprentissage fixés par les branches professionnelles pour chaque titre ou diplôme préparé dans leur secteur. Premier constat, les branches ont joué le jeu : 185 Commissions paritaires nationales de l’emploi (CPNE) sur 240 ont émis des valeurs, certaines sur l’ensemble des titres et diplômes de leur périmètre, d’autres se concentrant sur leur cœur de métier. À partir de ces propositions, nous avons déterminé une valeur pivot fondé sur le calcul d’une médiane ou d’une moyenne et défini une marge de tolérance.

Ce qui est rassurant c’est que les branches avec l’appui des opérateurs de compétences ont réalisé un travail analytique de leurs coûts au contrat et ne se sont pas inscrites dans une logique inflationniste. Au final, 70 % des valeurs proposées ont été jugées convergentes et 30 % ont fait l’objet de recommandations. Les branches ont maintenant jusqu’au 15 avril pour les prendre en compte.

À défaut, l’État fixera le niveau de prise en charge par décret. Ce sera le cas aussi pour celles qui n’ont pas émis de valeurs. Tous les niveaux de prise en charge devraient être  fixés courant mai et ce pour une durée de deux ans. Mais le processus de recommandation n’est pas statique. Des révisions sont possibles. Nous allons instaurer un dialogue de gestion avec les branches, les réseaux de CFA et les représentants des régions. Ces échanges doivent nous permettre de faire évoluer, si besoin les niveaux de prise en charge et de tenir compte de la création de nouvelles certifications sur des métiers émergents notamment.

QDF : Quelles sont vos prochaines échéances ?

S. L : Le 4 avril, le conseil d’administration discutera et votera le lancement de la procédure de passation du marché « Service CEP [ 1 ]Conseil en évolution professionnelle délivré par les opérateurs régionaux sélectionnés par France compétences » hors agents publics. C’est un nouveau marché. Il est essentiel que nous respections notre devoir de réserve jusqu’à son lancement. Je peux toutefois dire que nous serons très vigilants sur d’éventuels conflits d’intérêt ou encore sur la capacité des candidats à assurer leur service dans tous les territoires. France compétences se chargera ensuite de la sélection des opérateurs. Nous devrons finaliser l’instruction des dossiers en octobre prochain.

À moyen terme, nous aurons aussi à aborder la question de la démarche qualité. France compétences établira une liste des autorités labellisantes.

En parallèle, nous avons à construire notre système d’information qui fera l’interface avec les  autres acteurs comme la Caisse des dépôts, les Commissions paritaires interprofessionnelles régionales, les opérateurs du CEP ou encore l’Urssaf. Autre sujet à lancer, celui des observatoires des branches. Nous allons travailler avec les opérateurs de compétences afin de rendre plus accessibles et plus homogènes leurs analyses. Il sera aussi intéressant de définir un langage commun notamment sur les compétences.

QDF : Comment s’organisent les équipes de France compétences ?

S. L : Trois directions supports et cinq directions métiers opérationnelles ont été créées (lire ci-dessous). S’ajoutent à cette organisation, quatre commissions. Ce sont des lieux d’impulsion, d’initiative et d’aide à la décision. Elles  travailleront en étroite collaboration avec les directions métiers. La commission de la certification professionnelle a débuté ses travaux et commencera mi-avril à étudier les premières demandes d’enregistrement aux répertoires nationaux. En même temps, nous venons de recruter un responsable des ressources humaines, une fonction essentielle pour fédérer les équipes et identifier les nouveaux besoin en compétences.

Nous avons prévu une enveloppe correspondant à 3 % de notre budget de fonctionnement pour le plan de développement des compétences des équipes dans des domaines comme notamment le traitement de la donnée statistique, l’analyse financière.


L’organisation de France Compétences

Cinq directions métiers :

  • Politiques de financement : Cécile Bosdonnat
  • Régulation : Michel Ferreira-Maia (à compter du mois d’avril)
  • Certification professionnelle : Mikaël Charbit
  • Territoires et partenariats : Véronique Dessen-Torres
  • Évaluation et observations : Marc-Antoine Estrade

Quatre commissions :

  • Certification professionnelle.
  • Recommandations
  • Audit et finances
  • Évaluation

Stéphane Lardy était présent à la 16è Université d’hiver de la formation professionnelle organisée à Biarritz par Centre Inffo (30 janvier-1er février 2019)

Notes   [ + ]

1. Conseil en évolution professionnelle